Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/47

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nous réduisons le sexe faible. Il a trop de bon sens pour rêver une invasion de jupes dans la politique, mais il tient et il maintient qu’au point de vue du cœur une femme vaut un homme, si tant est qu’elle ne vaille pas mieux. Son équité voudrait que le sexe le plus faible ne fût pas condamné toute la vie à attendre le bon plaisir du plus fort. Lorsqu’il voit, dans un bal de province, une fille intelligente et bonne faire tapisserie de huit heures à minuit, ses nerfs s’agacent « Eh quoi ! dit-il, la pauvre enfant est soumise au caprice de neuf ou dix garçons ignorants et vulgaires dont le meilleur ne vaut pas son petit doigt ! » Je n’ai pas besoin d’ajouter que les vieilles filles, si injustement raillées en tout pays, sont le plus cher objet de ses sympathies. Il enrage de voir les carrefours de la vie honnête encombrés de personnes aimables et respectables, qui n’attendent même plus le bon plaisir de l’homme, et qui, pour consoler la douleur la plus amère, n’obtiennent que les ricanements du mépris. « Est-ce leur faute, dit-il, si elles n’ont pas trouvé quelques billets de mille francs dans leur berceau ? Or, il en faut au moins une poignée pour acheter un secrétaire de la mairie ou un employé des droits réunis. Pouvaient-elles amasser un capital par elles-mêmes ? Nous vivons dans un monde où la femme est exclue de tous les travaux lucratifs ! Or, la femme qui n’a pas les