Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/117

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vers ses hôtes en se dandinant d’un air crâne, se mit à cheval sur la chaise qui lui avait déjà servi, releva les crocs de sa moustache, et dit :

« Ah çà, causons. J’ai donc été malade ?

— Très-malade.

— C’est fabuleux. Je me sens tout dispos. J’ai faim, et même en attendant le dîner, je boirais bien un verre de votre schnick. »

Mme Renault sortit, donna un ordre et rentra aussitôt.

« Mais, dites-moi donc où je suis ! reprit le colonel. À ces attributs du travail, je reconnais un disciple d’Uranie ; peut-être un ami de Monge et de Berthollet. Mais l’aimable cordialité empreinte sur vos visages me prouve que vous n’êtes pas des naturels de ce pays de choucroute. Oui, j’en crois les battements de mon cœur. Amis, nous avons la même patrie. La sensibilité de votre accueil, à défaut d’autres indices, m’aurait averti que vous êtes Français. Quels hasards vous ont amené si loin du sol natal ? Enfants de mon pays, quelle tempête vous a jetés sur cette rive inhospitalière ?

— Mon cher colonel, répondit M. Nibor, si vous voulez être bien sage, vous ne ferez pas trop de questions à la fois. Laissez-nous le plaisir de vous instruire tout doucement et avec ordre, car vous avez beaucoup de choses à apprendre. »

Le colonel rougit de colère et répondit vivement :