Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/164

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sa chandelle, ouvrit la porte, et vint à pas de loup éteindre la bougie. Mais soit que les yeux du dormeur eussent perçu vaguement le passage d’une ombre, soit que Gothon, grosse personne mal équarrie, eût fait craquer une feuille du parquet, Fougas s’éveilla à demi, entendit le frôlement d’une robe, rêva quelqu’une de ces aventures qui animaient la vie de garnison sous le premier empire, et étendit les bras à l’aveuglette en appelant Clémentine ! Gothon, prise aux cheveux et au corsage, riposta par un soufflet si masculin que l’ennemi se crut attaqué par un homme. De représailles en représailles, on avait fini par s’étreindre et rouler sur le parquet.

Qui fut honteux ? ce fut maître Fougas. Gothon s’alla coucher, passablement meurtrie ; la famille Renault parla raison au colonel et en obtint à peu près tout ce qu’elle voulut. Il promit de partir le lendemain, accepta à titre de prêt la somme qui lui fut offerte, et jura de ne point revenir qu’il n’eût récupéré ses épaulettes et encaissé l’héritage de Dantzig.

« Alors, dit-il, j’épouserai Clémentine. »

Sur ce point-là, il était superflu de discuter avec lui : c’était une idée fixe.

Tout le monde dormit solidement dans la maison Renault : les maîtres du logis, parce qu’ils avaient passé trois nuits blanches ; Fougas et Gothon, parce