Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/226

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— Heureusement, monsieur, dit Meiser, mon âge me met à l’abri de toute brutalité. Vous ne voudriez pas fouler aux pieds le cadavre d’un vieillard !

— Vénérable canaille ! mais tu m’aurais tué comme un chien, si ton pistolet n’avait pas raté !

— Il n’était pas chargé, monsieur le colonel ! Il n’était… presque pas chargé ! Mais je suis un homme accommodant et nous pouvons très-bien nous entendre. Je ne vous dois rien, et d’ailleurs il y a prescription ; mais enfin… combien demandez-vous ?

— Voilà qui est parlé. À mon tour ! »

La complice du vieux coquin adoucit le timbre de sa voix : figurez-vous une scie léchant un arbre avant de le mordre.

« Écoute, mon Claus, écoute ce que va dire M. le colonel Fougas. Tu vas voir comme il est raisonnable ! Ce n’est pas lui qui penserait à ruiner de pauvres gens comme nous. Ah ! ciel ! il n’en est pas capable. C’est un si noble cœur ! Un homme si désintéressé ! Un digne officier du grand Napoléon (Dieu ait son âme !).

— Assez, la vieille ! dit Fougas avec un geste énergique qui trancha ce discours par le milieu. J’ai fait faire à Berlin le compte de ce qui m’est dû en capital et intérêts.

— Des intérêts ! cria Meiser. Mais en quel pays,