Page:About - L’Homme à l’oreille cassée.djvu/68

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bre, à l’heure de mon souper, et le bas officier Garok, qui commandait le village, me fit requérir de force pour assister à l’interrogatoire et servir d’interprète.

La figure ouverte, la voix mâle, la résolution fière et la belle attitude de cette infortuné me gagnèrent le cœur. Il avait fait le sacrifice de sa vie. Son seul regret, disait-il, était d’échouer au port, après avoir traversé quatre armées, et de ne pouvoir exécuter les ordres de l’empereur. Il paraissait animé de ce fanatisme français qui a fait tant de mal à notre chère Allemagne, et pourtant je ne sus pas m’empêcher de le défendre, et je traduisis ses paroles moins en interprète qu’en avocat. Malheureusement on avait trouvé sur lui une lettre de Napoléon au général Rapp, dont j’ai conservé copie :

« Abandonnez Dantzig, forcez le blocus, réunissez-vous aux garnisons de Stettin, de Custrin et de Glogau, marchez sur l’Elbe, entendez-vous avec Saint-Cyr et Davoust pour concentrer les forces éparses à Dresde, Torgau, Wittemberg, Magdebourg et Hambourg ; faites la boule de neige ; traversez la Westphalie qui est libre et venez défendre la ligne du Rhin avec une armée de 170 000 Français que vous sauvez !

« Napoléon. »


Cette lettre fut envoyée à l’état-major de l’armée