Deux insulaires se rencontrent sur le port de Syra.
« Bonjour, frère ; que fais-tu ? (c’est-à-dire : Comment vas-tu ? )
— Bien ; merci. Que dit-on de nouveau ?
— Le Dimitri, le fils de Nicolas, est revenu de Marseille.
— A-t-il gagné beaucoup d’argent ?
— Vingt-trois mille six cents drachmes, à ce qu’on assure. C’est beaucoup d’argent.
— Il y a longtemps que je me dis : Il faut que j’aille à Marseille. Mais je n’ai pas de bateau.
— Si tu voulais, nous en ferions un à nous deux. N’as-tu pas du bois ?
— J’en ai bien peu.
— On en a toujours assez pour faire un bateau. J’ai de la toile à voiles, et mon cousin Jean a des cordages : nous nous mettrons ensemble.
— Qui est-ce qui commandera ?
— C’est Jean : il a déjà navigué.
— Il nous faudra un petit garçon pour nous aider.
— J’ai mon filleul Basile.
— Un enfant de huit ans ! Il est bien petit.
— On est toujours assez grand pour naviguer.
— Mais quel chargement prendrons-nous ?
— Notre voisin Petros a des vallonées : le papas a quelques tonnes de vin ; je connais un homme de Tinos qui a du coton ; nous passerons à Smyrne, si tu veux, pour charger de la soie.
Le bateau se construit tant bien que mal ; l’équipage se recrute dans une ou deux familles ; on prend chez les voisins et les amis toutes les marchandises qu’ils veulent vendre, on va à Marseille en passant