Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/184

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ces climats privilégiés, la vertu est aussi facile que la sobriété.

Ajoutez que la vie privée est percée à jour : il n’y a véritablement qu’une ville dans le royaume, et Athènes est aussi petite ville que Carpentras ou Castelnaudry. Si l’épicier Thémistocle ou le barbier Périclès essuyait quelque malheur domestique, toute la ville le saurait le lendemain, et les petits garçons lui crieraient kérata, c’est-à-dire Sganarelle.

Dans les campagnes, la surveillance que tous exercent sur chacun est cent fois plus facile que chez nous, puisqu’il n’y a pour ainsi dire ni forêt, ni bois, ni bocage.

Les Grecs sont horriblement jaloux, car ils sont très vaniteux. Le mot kérata, dont on abuse à propos de tout, et que les enfants de trois ans se jettent les uns aux autres, est une injure très-vivement sentie lorsqu’elle a un sens véritable. Il y a quelques années, un homme du peuple se promenait un dimanche, à la musique, avec la femme d’un autre. Le mari vint droit à lui, le frappa en pleine poitrine d’un coup de couteau, et l’étendit mort sur la place. Personne n’inquiéta le meurtrier, qui put s’en retourner tranquillement chez lui. Les uns disaient : « C’est le mari ; » les autres en examinant le coup, s’écriaient : « Bien touché ! »

La haute société a, comme partout, des mœurs à part. La chronique scandaleuse d’Athènes est assez riche pour défrayer un petit Brantôme. Mais ces intrigues ont un caractère particulier : l’amour n’y entre pour presque rien. Tout roule sur la vanité ou sur l’intérêt.