l’âge de sa femme et de son cheval, le nombre de ses moutons et de ses enfants, mêlant tout, brouillant tout et parlant de tout à la fois.
« Et toi, me dit-il, quel âge as-tu ? Tu es bien jeune pour courir le monde. Quel âge ont tes amis ? Comment ! celui-là n’a que trente ans, et il porte déjà des lunettes ! Pourquoi ne parle-t-il pas le grec ? J’espère que ce n’est pas par mépris. Êtes-vous riches ? Vos parents sont-ils marchands ou militaires ? Avez-vous des frères et des sœurs ? De quel pays êtes-vous ! Français ! ah ! vraiment ! J’ai entendu parler de ce peuple-là. Mais, dis-moi, votre pays est-il au bord de la mer ? Est-il grand ? Avez-vous des fleuves comme les nôtres ? Cultivez-vous les mûriers, avez-vous des moutons, exercez-vous quelque genre d’industrie ? »
Je me disais en moi-même : « Si le papas remplit en même temps les fonctions de maître d’école, les enfants du village seront instruits ! »
Leftéri, moins patient que moi, l’interrompit avec cette familiarité grecque, qui prend sa source dans un vif sentiment de l’égalité : « Papas, tu es un curieux et un bavard ; tu nous ennuies. » Le brave homme se hâta de me prendre à témoin qu’il ne m’ennuyait pas. À mesure qu’il me parlait, j’écrivais notre conversation. Il saisit mon papier, s’arma d’une énorme paire de lunettes, et le regarda gravement dans tous les sens. « Ah ! tu sais écrire ! Saurais-tu aussi l’orthographe, par hasard ?
— À peu près, révérend.
— La politesse m’ordonne de te croire : on dit cependant que c’est une science bien ardue. »
En effet, l’orthographe est sérieusement difficile en