Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/337

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du genre humain dévaliserait l’autre. Madame la duchesse, vous avez fait preuve de sang-froid ce jour-là !

— Ce n’est pas la peine d’en parler, dit vivement la duchesse.

— Comment ? Et de quoi parlerait-on, grand dieu ! Vous étiez seule dans votre voiture, j’entends seule avec un officier grec qui tremblait comme la feuille et qui cachait son sabre entre ses genoux. Bibichi, dans sa joie de tenir une si riche capture, ne savait quelle somme vous demander : il parla d’abord de vingt mille doublons, puis de cent mille livres sterling. Quand vous vîtes qu’il ne connaissait pas bien la valeur des monnaies dont il parlait, l’idée vous vint de lui demander à combien de drachmes il fixait votre rançon. Il répondit : « deux cent mille. »

— Oui, ajouta la duchesse, qui ne pouvait plus échapper à son histoire, et le pauvre homme me disait d’un air pénétré : « madame, donnez-nous ces deux cent mille drachmes ; nous en ferons un bon usage ; nous nous retirerons en Turquie ; nous ne volerons plus personne ; nous achèterons quelque belle métairie, et nous bénirons tous les jours votre nom. » Si vous aviez vu avec quel respect il me parlait à la portière de ma voiture, vous auriez cru qu’il me demandait l’aumône.

— Une forte aumône. Et vous avez consenti ?…

— Oui, mais j’ai marchandé, et j’en ai été quitte pour signer un billet de quinze mille drachmes, que mon compagnon de voyage est allé toucher à Athènes tandis que les pauvres gens me retenaient en otage. Malheureusement, mon architecte qui arrivait au-