Page:About - La Question romaine.djvu/134

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duit les morts au cimetière, porté le viatique aux malades, distribué l’aumône aux malheureux. Le prélat romain est souvent un gros garçon qui sort du séminaire avec une tonsure pour tout sacrement. Il est docteur en quelque chose, il peut justifier d’un petit revenu, et n’entre dans l’Église en amateur, pour voir s’il y fera son chemin. Le pape lui permet de s’appeler monsignor, au lieu de signor, et de porter des bas violets. Ainsi chaussé, il se met en route, et le voilà trottant vers le chapeau de cardinal. Il passe par les tribunaux, ou par l’administration, ou par la domesticité intime du Vatican : tous les chemins sont bons, pourvu qu’on ait du zèle et qu’on professe un pieux mépris pour les idées libérales. La vocation ecclésiastique n’est pas de rigueur, mais on n’arrive à rien sans un bon fonds d’idées rétrogrades. Le prélat qui prendrait au sérieux la lettre de l’Empereur à M. Edgar Ney serait un homme fini ; il ne lui resterait plus qu’à se marier ; car on prend femme le jour où l’on désespère de parvenir. Un ambitieux découragé se tue, à Paris ; à Rome, il se marie.

Le prélat est quelquefois un cadet de grande famille. Sa maison est de celles qui ont droit au chapeau. Il le sait. Le jour où il met les bas violets, il peut d’avance commander ses bas rouges. En attendant, il fait son stage, prend du bon temps et jette ses gourmes. Les cardinaux ferment les yeux sur sa conduite, pourvu qu’il professe des idées saines. Fais tout ce que tu voudras, enfant de prince, mais que ton cœur soit clérical !