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soleil, et qu’il reste enfermé jusqu’au jour ; la police peut forcer son domicile à toute heure de la nuit pour constater sa présence. Sous aucun prétexte il ne peut sortir de la ville, même en plein midi ; la moindre infraction au règlement l’expose à la prison ou à un nouvel exil.

L’État pontifical est peuplé de gens soumis au precetto. Les uns sont des malfaiteurs qu’on surveille à domicile faute de place dans les prisons : les autres sont des suspects. Le total de ces malheureux n’est point publié dans les statistiques, mais je sais de source officielle que l’on en compte 200 à Viterbe : c’est une ville de 14 000 âmes.

L’insuffisance des prisons explique bien des choses, et notamment la liberté de parole qui règne dans tout le pays. Si le gouvernement se mettait en tête d’arrêter ceux qui le maudissent tout haut, il n’aurait ni assez de gendarmes, ni assez de geôliers, ni surtout un assez grand nombre de ces maisons de paix dont « la protection et la salubrité prolongent la vie de leurs habitants[1]. »

On permet donc aux citoyens de parler à leur aise, pourvu toutefois qu’ils ne gesticulent pas. Mais aucune parole ne se perd, dans un État surveillé par des prêtres. Le gouvernement a la liste exacte de ceux qui lui souhaitent du mal. Il se venge quand il peut, mais il ne court pas après la vengeance. Il guette les occasions ; patient, parce qu’il se croit éternel.

  1. Proemio della statistica pubblicata nel 1857, dall’eminentissimo cardinale Milesi.