Page:About - La Question romaine.djvu/31

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Mais quand une bonne fois j’eus franchi l’Apennin, quand je ne fus plus sous le vent de la capitale, je respirai comme une atmosphère de travail et de bon vouloir qui me ragaillardit le cœur. Les champs étaient non-seulement piochés, mais fumés, et, qui plus est, plantés. L’odeur des engrais me surprit beaucoup : j’en avais perdu l’habitude, car on ne fume pas la terre, sur le versant opposé. La vue des arbres et leur emploi me fit grand plaisir. Dans un champ semé de chanvre, ou de blé, ou de trèfle, de beaux ormes plantés en ligne se couronnaient d’une riche vendange. Quelquefois les ormes étaient remplacés par des mûriers. Que de biens à la fois, et que la terre est bonne fille ! Voilà du pain, du vin, des chemises, et des robes de soie pour madame, et du fourrage pour les bœufs ; l’orme aussi donne du fourrage. Saint-Pierre est une belle église, mais un champ bien cultivé est une admirable chose !

Je poussai jusqu’à Bologne à petits pas, toujours heureux, toujours souriant à la fécondité de la terre et à la vaillance de l’homme. Puis il fallut reprendre le chemin de Saint-Pierre et rentrer insensiblement dans la désolation des campagnes.

J’en eus pour longtemps à réfléchir sur ce que j’avais vu, et une idée inquiétante se glissa dans mon esprit sous forme géométrique. Il me sembla que l’activité et la prospérité des sujets du pape étaient en raison directe du carré des distances, qui les séparent de la capitale ; ou, pour parler plus humainement, que l’ombre