Page:About - Le Roi des montagnes.djvu/104

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simples, élevés à la campagne et attachés aux vieux usages du pays. Je fais leur éducation du mieux que je peux, mais je mourrai avant de les avoir policés. Les hommes ne se refondent pas en un jour comme les couverts d’argent. Moi-même, tel que vous me voyez, j’ai trouvé du plaisir à ces ébats grossiers ; j’ai bu et dansé tout comme un autre. Je ne connaissais pas la civilisation européenne : pourquoi me suis-je mis si tard à voyager ? Je donnerais beaucoup pour être jeune et n’avoir que cinquante ans. J’ai des idées de réforme qui ne seront jamais exécutées, car je me vois comme Alexandre, sans un héritier digne de moi. Je rêve une organisation nouvelle du brigandage, sans désordre, sans turbulence et sans bruit. Mais je ne suis pas secondé. Je devrais avoir le recensement exact de tous les habitants du royaume, avec l’état approximatif de leurs biens, meubles et immeubles. Quant aux étrangers qui débarquent chez nous, un agent établi dans chaque port me ferait connaître leurs noms, leur itinéraire, et, autant que possible, leur fortune. De cette façon, je saurais ce que chacun peut me donner ; je ne serais plus exposé à demander trop ou trop peu. J’établirais sur chaque route un poste d’employés propres, bien élevés et bien mis, car, à quoi bon effaroucher les clients par une tenue choquante et une mine rébarbative. J’ai vu en France, en Angleterre, des voleurs élégants jusqu’à l’excès : en faisaient-ils moins bien leurs affaires ?

« J’exigerais chez tous mes subordonnés des manières exquises surtout chez les employés au département des arrestations. J’aurais pour les prisonniers de distinction comme vous des logements confortables, en bon air, avec jardins.