Après avoir ébloui de son luxe tous les hobereaux des environs, elle voulut aller à Paris prendre sa revanche sur le passé, et elle conta ses projets à son mari. Le capitaine fronça le sourcil et déclara net qu’il se trouvait bien à Arlange. La cave était bonne, la cuisine de son goût, la chasse magnifique ; il ne demandait rien de plus. Le faubourg Saint-Germain était pour lui un pays aussi nouveau que l’Amérique : il n’y possédait ni parents, ni amis, ni connaissances. « Bonté divine ! s’écria la pauvre Éliane, faut-il que je sois tombée sur le seul marquis de la terre qui ne connaisse pas le faubourg Saint-Germain ! »
Ce ne fut pas son seul mécompte. Elle s’aperçut bientôt que son mari prenait l’absinthe quatre fois par jour, sans parler d’une autre liqueur appelée vermouth qu’il avait fait venir de Paris pour son usage. personnel. La raison du capitaine ne résistait pas toujours à ces libations répétées, et lorsqu’il sortait de son bon sens, c’était, le plus souvent, pour entrer en fureur. Ses vivacités n’épargnaient personne, pas même Éliane, qui en vint à souhaiter tout de bon de n’être plus marquise. Cet événement arriva plus tôt qu’elle ne l’espérait.
Un jour le capitaine était souffrant pour s’être trop bien porté la veille. Il avait la tête lourde et les yeux battus. Assis dans le plus grand fauteuil du salon, il lustrait mélancoliquement ses longues moustaches