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Page:About - Rome contemporaine.djvu/142

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figure que le meurtrier serait en droit d’invoquer la prescription, et le seul mot qu’on entende circuler dans la foule, c’est poveretto ! Le pauvret !

Au mois de juillet 1858, M. le général comte de Noüe, galant homme s’il en fut, et partisan dévoué de l’autorité pontificale, s’arrêta quelques semaines à Viterbe. Dans une de ses promenades, il entendit plusieurs voix mâles qui chantaient des psaumes dans la prison de la ville. Ces choristes étaient vingt-deux condamnés à mort qui attendaient depuis plusieurs années l’heure de l’exécution.

Le gouvernement lui-même se fait comme un cas de conscience de mettre à mort un homme repenti et peut-être amendé. Je vous ai dit qu’il était d’une bonté et d’une douceur paternelles ; j’aurai plus d’une fois à répéter le même éloge. Un pape ne saurait oublier qu’il représente ici-bas le Dieu de miséricorde ; le saint-père, quel qu’il soit, a toujours horreur du sang. Mais il me paraît juste que la miséricorde s’applique d’abord à ceux qu’on assassine, et le premier devoir de ceux qui ont horreur du sang est d’effrayer ceux qui le répandent.

Il y a quarante ans encore, le meurtrier d’un prêtre était démembré comme un poulet rôti sur la place du Peuple[1]. Je ne demande pas qu’on revienne à ces férocités

  1. « Ludovico monta l’échelle de l’échafaud…
      « Mastro Titta tire de dessous sa casaque rouge un gros bâton pointu et l’examine avec soin. Il joue ensuite avec ce gourdin comme un tambour-major avec sa longue canne à pomme d’argent… Enfin, il l’empoigne ferme, le fait tourner deux fois autour de sa tête et frappe le condamné sur la tempe gauche.
      « Un cri d’horreur part de la foule. La victime tombe comme un bœuf et son corps commence à se débattre dans l’agonie…
      « Mastro Titta jette son gourdin loin de lui, au milieu de la foule. Il s’abat de nouveau sur la victime, tire un long couteau de boucher, et l’égorge. Puis, avec le même couteau, il lui fait un cercle profond autour du cou, comme pour tracer la ligne, et coupe ensuite la tête qu’il montre au peuple. Le sang de cette tête rougit le bourreau, tandis que deux jets s’élancent du cou coupé et vont inonder la robe du prêtre. Vous croyez que c’est fin ? Non. Mastro Titta coupe les deux bras à la clavicule, les deux jambes au genou du cadavre, et ramassant des pieds et des mains, bras, jambes, tête, tronc, il jette le tout dans un coffre en bas de l’échafaud…
      « Un an après, mourait à l’hôpital de Santo-Spirito un jeune homme de bonne famille ; il avoua que c’était lui qui avait tué Mgr Traietto pour venger un outrage. »
      Petruccelli della Gattina, Prélim. de la Quest. rom., chap. v, pages 44 et 45.