Page:About - Rome contemporaine.djvu/196

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Le domestique de place gagna un deuxième pourboire en nous conduisant chez un peintre renommé. J’ai su depuis qu’il ne nous avait pas menés chez le pire de la ville, mais du diable si je m’en étais douté dans l’atelier ! Les marbriers romains, tout médiocres qu’ils sont, doivent avoir le pas sur les fabricants de peinture. C’est ici que les compositions sont plates ! c’est ici que la pauvreté des idées, la banalité du dessin, l’innocence de la couleur font un ensemble affadissant ! Pour le coup, mon Américain se trouva de mon avis. Cependant il donna une séance de deux heures, parce que l’artiste était complaisant, parce qu’on l’avait appelé Excellence, parce qu’on lui promit de le peindre en pêcheur napolitain, dans un champ de cotonniers, avec son rifle sur l’épaule et sa filature à l’horizon.

Mais comme un portrait, si intéressant qu’il soit, ne suffit pas à décorer un hôtel, nous nous fimes voiturer chez un peintre qui copie les tableaux des maîtres pour l’exportation. « Décidément, me disait l’Américain, j’aime mieux cent bonnes copies que cent originaux médiocres. Ces reproductions suspendues à tous les murs de mon hôtel me rappelleront les chefs-d’œuvre de l’école italienne que j’aurai vus, un peu vite, dans les musées et dans les galeries. »

La grande fabrique de copies, qui défraye toute l’Europe inintelligente, n’occupe jamais moins de cinquante ouvriers. Cinquante jeunes gens, réunis autour d’un entrepreneur, copient du matin au soir des copies faites sur des copies. Une douzaine de tableaux, qui ne sont pas les meilleurs, ont le privilège de se recopier éternellement, à l’exclusion de tous les autres. La Cenci du Guide, le Joueur