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grâce à une bouteille de Monte-Pulciano que le père avait acceptée imprudemment.

Il ne tiendrait qu’à nous de jouer le même jeu, car voici un voiturin qui nous suit pas à pas, comme pour recueillir notre poussière. Cinq filles à marier ! Et assez jolies, ma foi. Et le nez coloré de monsieur leur père ne témoigne pas d’un grand mépris pour le vin de Monte-Pulciano. Mais personne de nous ne songe au mariage[1].

C’est au bagne de Civita-Castellana que le fameux Gasperone expie assez doucement ses crimes. Je devais une visite à ce grand homme et je sors de chez lui.

Chez lui, est le mot propre, car il règne littéralement dans ce bagne de terre ferme. Treize ou quatorze anciens bandits lui composent une cour. Le gouvernement lui sert une liste civile de cinq sous par jour, pour frais de représentation. Les étrangers qui viennent le voir lui payent tribut.

Ce monarque à perpétuité me reçut dans une grande chambre qui lui sert de salle du trône. Il fit trois pas au-devant de moi et me tendit la main avec un sourire protecteur. Les personnes de sa cour et quelques gendarmes firent cercle autour de nous.

Gasperone est un grand vieillard d’une beauté remarquable. Sa taille est droite et fière, ses traits mâles et réguliers, son regard étincelant. Il porte une longue barbe blanche. L’explosion d’un fusil chargé à poudre a marbré sa figure d’une myriade de petites taches bleuâtres. Son costume de gros drap est celui d’un paysan aisé ; on l’a dispensé de

  1. Le fait est que mes quatre compagnons sont encore célibataires, excepté deux. Septembre 1860.