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blement tout un quartier au sud du vieux port, ont conservé une physionomie antique et primitive. Figurez-vous une vaste nef où quelques chaudrons cyclopéens, chauffés par des foyers invisibles, bouillonnent et écument en silence. Un peu plus loin, le savon refroidit dans de larges réservoirs. On le découpe en briques, on le pèse, on l’emballe : la vapeur n’a rien à faire ici. Ces énormes maisons sont des temples d’industrie patriarcale et de probité héréditaire. Le fabricant s’applique à maintenir la réputation de sa marque, et ce n’est pas chose facile. La moindre falsification dans les huiles qu’il achète peut gâter toute une cuvée de savon.

C’est surtout à la savonnerie que Marseille devait autrefois sa renommée d’infection et de malpropreté. Rien n’est plus sale que le savon tandis qu’il se fait. Il laisse derrière lui des résidus liquides et solides que les Marseillais de l’âge d’or déposaient à leur porte ou écoulaient dans le port. L’administration ne permet plus tant de laisser aller : on fait jeter les eaux sales loin du port et les terres fétides loin de la ville. Peut-être un jour toute l’industrie savonnière se transplantera-t-elle dans la banlieue. Les fabricants, s’ils se décident à émigrer à quelques kilomètres, économiseront les transports et les octrois qui grèvent leurs produits ; ils restitueront à la population aisée de Marseille un beau quartier bien tracé et bien bâti, que l’odeur rend inhabitable. Ils pourront s’établir dans le voisinage des fabriques de soude, où mille ouvriers travaillent pour eux.

Je ne m’éloignerai pas trop de l’épicerie en disant qu’on trouve à Marseille dix-huit raffineries de soufre et quarante fabriques de pâtes d’Italie. On y prépare ces confi-