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Page:About - Rome contemporaine.djvu/42

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l’achetait à n’importe quel prix, sûr de revendre à bénéfice. En effet, tandis que le chargement accourait, vent arrière, vers le port de Marseille, il était demandé sur la place, vendu, revendu, toujours en hausse, et il changeait vingt fois de maître avant d’entrer dans le port. Entre les acquéreurs et les vendeurs circulait le courtier, homme habile, intéressé à faire croître et multiplier les affaires. On a vu des chargements passer par tant de mains que la vente de blé suffisait tout juste à payer les courtages. On a vu le principal courtier de Marseille, un jeune homme qui a véritablement le génie de l’entremise, gagner 1 200 000 francs dans un an !

Cet empressement téméraire des Marseillais a pu jeter quelque embarras dans leurs affaires, mais n’oublions pas qu’il nous a donné du pain.

Il était impossible que le retour de l’abondance et la baisse de toutes les denrées ne prît pas quelques spéculateurs au dépourvu. Les crises financières qui entraînent certains désastres privés sont une conséquence inévitable du développement du crédit. Nos pères ne les connaissaient pas, mais ils connaissaient la famine.

La spéculation sur les fonds publics et les valeurs industrielles est du fruit nouveau à Marseille. Cependant on estime que du 1er janvier 1855 au 1er janvier 1858, les Marseillais ont acheté du papier pour une centaine de millions. J’entends du papier solide, tel que rentes sur l’État, actions des chemins de fer et obligations garanties.

Jusque-là, le parquet faisait une besogne assez ingrate : il négociait des actions locales de peu de valeur, pour le compte de spéculateurs sans argent. On trafiquait sur des mines douteuses, des tourbières incertaines, et des ban-