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grand seigneur de Jérusalem. Le musée ne manque pas de bons tableaux, mais ils ne sont ni bien rangés, ni bien éclairés, ni bien entretenus. C’est ici que je me brouille avec le conseil municipal de Marseille. Il est fâcheux que des deux salles de peinture, la première soit mal éclairée et la deuxième ne le soit pas du tout. On regrette de voir trôner à la place d’honneur cinq ou six croûtes de l’école moderne, quand le Mercure de Raphaël, copié à la Farnésine par M. Ingres, est placé sous le plafond, dans le coin le plus obscur d’une chambre noire. Enfin les restaurateurs du cru sont presque aussi imprudents que nos vandales de Paris.


De tous les privilèges municipaux, savez-vous quel est celui qu’on aime le plus en province ? celui dont on est le plus fier ? celui qu’on défend avec le plus d’obstination contre les empiétements de la capitale ? C’est le droit de démolir un beau bâtiment pour en bâtir un laid ; de choisir une mauvaise statue entre dix bonnes, de faire la nuit et le jour dans un musée, et d’élire un professeur de dessin qui ne sache pas dessiner. Cette fureur n’est pas spécialement française ; on peut l’observer à loisir dans toute l’Europe civilisée, et elle contribue depuis nombre d’années à la décadence que nous voyons. Dans toute ville de dix mille âmes, les notables disent unanimement : « Nous avons le droit, pour notre argent, de protéger les arts à notre guise. Aucun pouvoir humain ne peut nous empêcher de gouverner la barque de travers, attendu que la cargaison est à nous. »