Page:About - Rome contemporaine.djvu/79

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rieux, naïfs et subtils, susceptibles à l’excès sans beaucoup de dignité, prudentissimes à l’ordinaire et capables des imprudences les plus sanglantes ; extrêmes dans le dévouement et dans la haine ; faciles à émouvoir, difficiles à convaincre ; plus ouverts aux sentiments qu’aux idées ; sobres par habitude, terribles dans l’ivresse ; sincères dans les pratiques de la dévotion la plus outrée, mais aussi prompts à se brouiller avec les saints qu’avec les hommes ; persuadés qu’ils ont peu de chose à espérer sur cette terre, réconfortés de temps en temps par l’espoir d’un monde meilleur, ils vivent dans une résignation un peu murmurante sous un gouvernement paternel qui leur donne du pain lorsqu’il y en a. L’inégalité des conditions, plus apparente à Rome qu’à Paris, ne les porte point à la haine. Ils sont rangés à la modestie de leur sort, et ils se félicitent qu’il y ait des riches pour que le pauvre puisse avoir des bienfaiteurs. Aucun peuple n’est moins capable de se conduire lui-même ; aussi le premier venu les mène-t-il aisément. Ils ont joué le rôle de comparses dans toutes les révolutions de Rome, et plus d’un s’est bien battu sans comprendre la pièce qui se jouait. Ils croyaient si peu à la république qu’en l’absence de toutes les autorités, lorsque le saint-père et le sacré collège étaient réfugiés à Gaëte, trente familles plébéiennes ont campé chez le cardinal Antonelli sans y casser un verre. Le rétablissement du pape sous la protection d’une armée étrangère ne les a pas étonnés : ils l’attendaient comme un événement heureux et le retour de la tranquillité publique. Ils vivent en paix avec nos soldats, quand nos soldats n’interviennent point dans leurs ménages, et l’occupation ne les contrarie que lorsqu’ils en sont per-