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individuelles, comme c’est admis par beaucoup de sociologues contemporains. Mais, lorsque nous disons : synthèse, il n’est pas permis d’oublier que l’essence de toute chose composée doit se retrouver dans ses éléments ; car les composantes ne peuvent pas différer essentiellement de leur produit, et « le caractère de tout composé est déterminé par le caractère de ses parties composantes » (Spencer), en sorte que l’unité de certains phénomènes doit avoir implicitement les mêmes attributs qui se manifestent explicitement dans leur combinaison, et cela en raison de cette loi logique, que les choses absolument différentes ne peuvent provenir les unes des autres. Une synthèse n’est que le côté formel de quelque chose d’essentiel, est le développement d’une certaine possibilité impliquée dans les composantes, et ne peut créer rien d’absolument nouveau. Ainsi, par exemple, les forces attractives latentes dans les molécules se manifestent dans un corps chimique, comme sa dureté ou ses formes cristallines ; la vie latente dans les granulations du protoplasme, se développe dans les fonctions de l’organisme ; et, dans les atomes du charbon, de l’oxygène, de l’azote et de l’hydrogène, qui apparaissent dans de certaines conditions comme éléments constitutifs du protoplasme, doit être impliquée — comme une des propriétés essentielle de leur être — la possibilité de cette synthèse spécifique qui porte la vie dans son sein ; il nous serait également difficile d’imaginer que ces éléments mêmes, dans leur essence, soient tout à fait étrangers au caractère vital de la synthèse, que de supposer qu’une juxtaposition seule de n’importe quels éléments, une combinaison, par exemple, des atomes du fer et du chlore, pourrait manifester une vie. Donc, d’après cette règle générale, la conscience sociale, considérée comme une synthèse des consciences individuelles, quoique d’une nature distincte et plus élevée que ses composantes, devrait cependant appartenir essentiellement à leur être, devrait être impliquée dans la conscience individuelle, dans notre « moi » propre, pour pouvoir se développer, se manifester, dans les faits sociaux[1].

  1. Nous trouvons chez M. Tarde une pensée analogue : « Rien de plus banal, dit-il, que cette idée qu’une combinaison diffère ou peut différer entièrement de ses éléments, et que du simple rapprochement de ceux-ci peut jaillir une réalité entièrement nouvelle, nullement préexistante sous d’autres formes. La chimie et la biologie ont accrédité ce préjugé. Ici, en sociologie, nous avons, par un privilège singulier, la connaissance intime de l’élément,