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tout « doit-être » et tout effort conscient de la volonté humaine est tout aussi bien superflu et dénué d’un sens quelconque, qu’envers n’importe quels processus naturels.

Car, si nous envisageons la vie comme objet d’une étude scientifique, il nous est impossible d’y apercevoir autre chose qu’une série continue de phénomènes, se développant dans les rapports du temps et de l’espace, qui, reliés ensemble par des liens inébranlables de causalité, se déterminent réciproquement dans leur qualité, dans leur succession et coexistence. Par conséquent, chaque phénomène donné, considéré comme terme de cette série, alors même qu’il appartient encore tout à fait au domaine de l’avenir, et n’existe que comme possibilité d’un fait lointain, porte néanmoins l’empreinte ineffaçable d’un conditionné, et c’est dans ce caractère seulement qu’il peut être pensé. Or, conditionné signifie, que son existence ne commence pas d’une manière spontanée et indépendante, au moment même de l’apparition du phénomène dans sa forme individuelle et explicite, mais qu’elle est déjà impliquée in potentia dans certains faits qui ont précédé ce moment d’apparition manifeste, qu’elle est entièrement déterminée par la totalité de ses conditions, déterminée aussi bien dans sa qualité que dans le temps, et par conséquent nécessaire. — Les faits futurs, devant arriver, prévus, quand on les considère scientifiquement, c’est-à-dire, comme effets de certaines conditions données, diffèrent de la réalité par cela seulement, que leur individualité ne s’est pas encore manifestée dans une existence distincte, mais qu’elle repose latente au sein de ses conditions, s’identifiant avec elles ; néanmoins elle possède une réalité aussi déterminée et naturelle, aussi indifférente à tous les élans de la volonté humaine, que les conditions mêmes. — Par conséquent, partout où apparaît le conditionné (et tout l’est au point de vue de la science), il n’y a plus de place pour l’inconditionnel moral (éthique), pour la contingence découvrant le champ devant la finalité créatrice des efforts volontaires ; il n’y peut s’agir que de ce qui est, fut, ou sera, mais nullement de ce qui doit être, sans que le sens propre de cette catégorie soit anéanti. La certitude d’un certain fait prévu, la possibilité plus ou moins grande de son apparition, ne dépend que du degré de la connaissance que nous avons des conditions de ce fait, croissant à mesure que cette connaissance s’approche de la totalité de ces conditions ; mais n’a rien de commun avec l’essence même de la chose, la possibilité objective, indépen-