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dante de notre connaissance, du fait ; car, objectivement, tout fait est nécessaire, ou bien tout à fait impossible.

Et de même que la méthode scientifique, prise dans les cadres de la causalité, exclut tout élément créateur, au sens strict du mot, élément de création arbitraire de quelque chose qui pourrait être, mais pourrait aussi ne pas être, de même, la création, aussi bien dans la morale et les beaux-arts, que dans la politique, contredit la méthode scientifique, se pose au-dessus de l’expérience, et cherchant son objet hors de l’expérience, agit tout comme s’il n’y avait point de causalité. — Mon action, déterminée par des conditions certaines, n’est plus une création, mais seulement un phénomène d’un caractère spécial, entraîné dans une série de causes, et alors, elle perd sa signification morale, sa dignité de devoir ; et son objet, des hauteurs de l’idéal, étrangères à toute expérience, descend au grade d’effet ordinaire, de résultat d’une nécessité spontanée et indépendante de nous. — Or, le concept « création » implique celui de contingence. Mon action, au lieu d’être un terme déterminé dans la grande série des phénomènes, se manifeste ici avec le caractère d’une cause finale, spontanée et décisive, comme un « fiat » définitif absolument inconditionné, et nécessaire pour que l’idéal prévu puisse se réaliser. Sans mon effort créateur, ce qui pourrait arriver n’arrivera point ; mais l’effort créateur de ma volonté se conditionne lui-même, peut être ou ne pas être. C’est le principe de la contingence. — Conformément à ce principe, l’objet de mon effort créateur, la fin, ayant sa source dans l’arbre inconditionné de la volonté, et par conséquent, délivré de la causalité naturelle, comme n’étant point nécessairement déterminé par des conditions existantes quelconques, et par là même, ne pouvant résulter d’une série antécédente de phénomènes, — cet objet ne peut pas être lui-même un phénomène (puisque chaque phénomène est soumis à la causalité) ; il ne fait pas partie du monde embrassé par notre expérience, mais constitue un idéal, c’est-à-dire, une possibilité phénoménale telle, qu’elle peut entrer dans un rapport causal uniquement avec un acte libre de la volonté consciente, et que, quand elle se réalise et entre dans le monde des phénomènes, ce n’est que comme effet d’une cause finale, comme but librement atteint, mais n’est jamais déterminée comme une nécessité dans une série de phénomènes se développant naturellement.

Ce principe de la contingence et cette supra-phénoménalité de l’objet, se manifeste de la manière la plus expressive et la plus claire dans la création artistique, donc là où la méthode scientifique,