Page:Abrantès - L’exilé : une rose au désert.djvu/19

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toute la maison, ne la quittait jamais, se nourrissait de sa main, et, lorsque Anna s’asseyait, la jolie bête se couchait à ses pieds… Aigri par la maladie, irrité contre un bonheur qui semblait braver sa souffrance, le général proscrivit l’innocent animal, et commanda qu’on le mît hors de l’hôtel :

— Elle te distrait des soins que tu me dois ! dit l’hypocondre en voyant pleurer Anna… je veux qu’elle sorte !

La chèvre mourut : en l’apprenant Anna crut, ce qui était possible, que la pauvre bête n’avait pu supporter son exil ; aussi fut-elle affectée au point de se livrer à une douleur sans mesure. Elle pleura avec un désespoir qui, dès lors, devait donner la mesure de ce que son âme aurait un jour de puissance pour aimer et souffrir. Sa mère et Raymond tentèrent vainement de la consoler ; c’était la première blessure faite à ce cœur tout amour, et cette leçon de douleur lui était