Page:Abregé de la vie des peintres (Roger de Piles, Muguet, 1699).djvu/507

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que lon ne peut aſſez admirer l’éxactitude avec laquelle il en a enrichi ſes Tableaux. Il auroit pû, comme Michelange, ſurprendre le jugement du Public. Celuy-cy fit la Statuë d’un Cupidon, & aprés en avoir caſſé le bras, qu’il retint, il enterra le reſte de la Figure dans un endroit où il ſavoit qu’on devoit foüiller ; & cet Ouvrage y ayant été trouvé, tout le monde le prit pour Antique : mais Michelange ayant préſenté à ſon tronc le bras qu’il avoit réſervé, convainquit de prévention tous ceux qu’il avoit trompez. On peut croire avec autant de raiſon, que ſi le Pouſſin avoir peint à fraiſque ſur un morceau de muraille, & qu’il en eût retenu quelque partie, il auroit facilement laiſſé croire que ſa Peinture étoit l’Ouvrage de quelque fameux Peintre de l’Antiquité, tant elle a de conformité avec celles que l’on a ainſi découvertes, & qui ſont véritablement Antiques.

Il nourriſſoit cet amour des Sculptures Antiques, en les allant éxaminer ſouvent dans les Vignes qui ſont au tour de Rome, où il ſe retiroit ſeul pour y faire plus en repos ſes réflexions. C’eſt auſſi dans de ſemblables retraites qu’il conſidéroit les effets extraordinaires de la Nature, par rapport au Paiſage, & qu’il y deſſinoit des Terraſſes, des Lointins, des Arbres,