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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/226

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appréciés ; soit qu’ils aient pris l’homme même, dans sa double nature passagère et immortelle, pour sujet de leurs profondes études et de leurs éloquentes révélations ; soit qu’ils aient considéré surtout dans la nature humaine, ses affections, ses passions, sa grandeur ou ses bassesses, sa noblesse ou ses travers, et qu’ils aient exprimé dans la langue des poètes leur enthousiasme, leur colère ou leur ironie : pour leur rendre un hommage digne d’eux, celui que vous admettez à les remplacer, s’engage, après eux, dans les sentiers qu’ils ont parcourus, se pénètre des œuvres qu’ils ont laissées, des vérités qu’ils ont défendues, des sentiments qu’ils ont exprimés ; s’élève et vous élève dans les régions intellectuelles, où ils ont doucement et glorieusement renfermé leur vie : toute leur histoire s’y trouve.

D’autres, au contraire, comme M. Pasquier, ont marqué principalement, par leurs actes, leur passage dans ce monde ; ce ne serait pas les faire connaître que de vous parler seulement de ce qu’ils ont dit et écrit, il faut vous rappeler ce qu’ils ont fait, et là se présente un écueil ! Peut-on séparer leur histoire de celle du temps où ils ont vécu ? Quelle tâche redoutable, s’il faut joindre au récit de leur vie celui des événements qui lui servent de cadre, et peindre à côté d’eux les personnages considérables dont ils étaient entourés !

Il m’a semblé, Messieurs, que vous ne me demanderiez pas de refaire le tableau de nos quatre-vingts dernières années, qui a été tant de fois et si bien fait, mais qu’il me suffirait de signaler, au milieu des événements qui les ont remplies, la part du noble confrère que vous avez perdu. L’œuvre est encore assez vaste. Le temps qu’il m’est permis d’y consacrer m’oblige à la resserrer au lieu de l’étendre. L’intérêt sérieux que je