Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/254

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se constitua juge de ses propres pouvoirs, régla ses procédés d’instruction, d’examen, de délibération, les conditions de ses jugements et même les pénalités qu’elle appliquait ; et cette toute-puissance judiciaire qu’elle s’attribuait n’excita jamais aucune réclamation, parce qu’elle l’exerça toujours avec une haute sagesse et dans le sens le plus favorable aux accusés.

Une plume exercée a publié, sous le titre de Précédents de la cour des Pairs, les délibérations d’où sont sorties les règles volontaires que la cour s’imposait ; en rendant justice aux savants collaborateurs de son président, il est impossible de ne pas remarquer l’influence prépondérante qu’il a exercée sur ces délibérations.

Mais son action se faisait encore plus sentir dans la conduite même des procès que la cour avait à juger.

Si la vivacité de son esprit s’échappait quelquefois dans la direction des débats politiques, son caractère changeait aussitôt qu’il se sentait magistrat. Jamais homme ne comprit mieux les devoirs attachés à ce titre sacré et ne s’y soumit plus absolument. Il faut faire remonter cette disposition aux impressions de sa jeunesse. Toutes les idées d’humanité dans l’administration de la justice criminelle avaient fini par pénétrer dans le parlement de Paris ; Duport en a été le puissant interprète à l’Assemblée constituante ; le président de la Cour des pairs les a fidèlement pratiquées. Quelle attention infatigable et en même temps quelle rare sagacité pour arriver à la découverte de la vérité ! quelle puissance d’analyse pour décomposer et réduire les procès les plus compliqués ! quel respect pour cet accusé qui n’est que malheureux jusqu’à ce que la cour éclairée l’ait déclaré coupable l