Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/266

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

formes, et celles que je pourrais encore décrire, sans en chercher bien loin les modèles, n’épuisent pas l’infinie diversité de ces types, où, sous la féconde influence des institutions libres, peut se produire l’art du discours judiciaire et politique. Elles n’ont pas épuisé non plus la juste ambition de l’Académie jalouse de s’associer les plus considérables représentants d’un art qui ne compte pas moins dans les lettres que dans l’État, et devenu, à un tel degré, l’objet de l’attention et de la faveur publique.

Il est une éloquence pressée d’agir, qui va d’abord droit à la cause, et, sans s’en laisser distraire un moment, en tire tous ses moyens ; qui d’arguments décisifs, habilement gradués, fortement liés, forme autour d’elle (c’est, m’a-t-on dit, l’ingénieuse et pittoresque comparaison d’un des maîtres actuels de la parole), forme autour d’elle comme une armure impénétrable à toutes les atteintes ; dont le mouvement, la chaleur sont surtout dans le progrès logique des idées ; dont l’éclat résulte de la propriété énergique, de la portée agressive ou défensive de l’expression ; éloquence simple, sobre, austère même, mais d’un effet puissant, et à l’action de laquelle concourt cette grande force oratoire, qu’une définition célèbre chez les anciens et digne de l’adoption des modernes plaçait dans la probité reconnue de l’orateur, dans l’ascendant de son caractère moral.

Cette éloquence, Monsieur, c’est la vôtre ; chacun l’a proclamé avant moi. Elle vous avait fait une bien honorable place dans l’Ordre qui vous a choisi pour son chef et qu’instruisaient vos exemples avant vos graves leçons, dans les conseils publics et, par intervalles, dans le gouvernement du pays : elle vous introduit aujourd’hui dans l’Académie qui