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Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/328

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Basses-Alpes, et pour devenir la mère et la servante des orphelines. Pendant cinq ans, elle travaille à leur préparer un asile ; une fois fondé, pour le soutenir, elle vend sa bibliothèque, son argenterie, ses bijoux, renonce à tous les avantages que sa naissance et sa fortune lui promettaient dans le monde ; sacrifie toute la succession de sa mère, toute celle de sa tante, se refuse le nécessaire, et jusqu’à la consolation si légitime de la correspondance avec les siens, afin de ne pas dérober une obole de son avoir aux enfants qu’elle s’est donnés. Ces pauvres petites lui arrivent dans un état de saleté indicible ; c’est elle qui les nettoie, les panse, leur rend ces soins rebutants que l’amour maternel peut seul ennoblir et expliquer. Bientôt, pour donner plus de stabilité à son œuvre, elle ajoute une communauté religieuse à l’asile ; mais ce n’est point pour se décharger sur autrui de son fardeau volontaire : elle y est à la fois supérieure, surveillante, maîtresse de classe et de travail, infirmière. À côté des orphelines elle admet leurs frères ; les douze petites filles avec lesquelles elle a commencé son œuvre, il y a vingt-sept ans, sont aujourd’hui représentées par cent dix enfants des deux sexes ; leur mère adoptive les soigne tous avec une égale sollicitude, dote les filles qui se marient, dirige les garçons vers une carrière adaptée à leurs moyens. Après leur sortie, son cœur maternel les suit encore, et eux ne l’oublient pas. Elle a déjà formé des prêtres, des commis, des ouvriers, des marins, des soldats, qui, du champ de bataille où ils se sont distingués, lui envoient le tribut de leur filiale reconnaissance. Le conseil général des Basses-Alpes a officiellement apprécié l’utilité de cette œuvre en même temps que le mérite et les hautes vertus de la fondatrice ; mais, à part quelques secours