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UNE GUERRE DE POULAILLER.




Les poules d’une basse-cour
S’étaient en deux partis follement divisées.
Leurs querelles sans fin, par des riens attisées,
Éclataient à chaque heure, à chaque instant du jour.
Elles se distinguaient par leur divers plumage :
Les unes l’avaient blanc, les autres l’avaient noir.
Elles se déplumaient du matin jusqu’au soir,
Et se disputaient avec rage
L’eau, l’avoine, le son, les auges, le perchoir.
Jamais Florence, au moyen âge.
N’avait montré sous les mêmes couleurs
Plus de combats et de fureurs.
Une poule plus débonnaire,
N’ayant ni noir ni blanc sur sa queue et son dos,
Voulut terminer cette guerre.
Et rendre au poulailler son antique repos.
Elle était fort diserte, et le don déloquence
Souffle à qui le possède un peu de vanité.
Cette poule en avait et se flattait d’avance
Qu’à sa faconde, à sa toute-puissance
Aucun parti n’eût résisté,
« Quelle rage, dit-elle, à la façon d’Homère,
« Quelle fureur vous pousse à vous entr’égorger ?