Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/663

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Qui, depuis deux cents ans, dans trente capitales,
Ont fait rire et pleurer les Huns et les Vandales,
Qui, fiers d’être opposés à nos plus grands auteurs,
Viennent prêter main-forte à nos réformateurs…
C’est ainsi qu’en triomphe, au bruit de leurs fanfares.
Dans la cité du goût sont rentrés les Barbares.
Le goût fuit devant eux, en soufflant son flambeau.
Avec l’art et le vrai, le bon sens et le beau.



Par les plus insensés la scène est envahie.
Là, sans règle et sans frein règne la fantaisie.
Là, nous sont présentés sous d’affreuses couleurs
Et l’homme et la nature et le monde et ses mœurs.
Sous de sales haillons ou la bure grossière,
La vertu n’y paraît qu’au fond d’une chaumière.
Tandis que, sans toucher aux vertueux laquais,
Tous les vices ensemble habitent les palais.
Là, plus contagieux, plus fatals que la peste,
Tous les crimes, qu’ailleurs l’honnête homme déteste.
Dans vingt drames divers s’étalent sans pudeur.
Et Paris tout entier y court avec fureur.



Non, ce serait trop peu, pour remplir tant de salles,
Des oisifs, que du siècle amusent les scandales,
De tous les vicieux, de tous les effrontés,
Que renferme en son sein la reine des cités.
Leur nombre, quel qu’il fût, ne saurait y suffire.
C’est l’honnête Paris que ce spectacle attire.