Page:Académie française - Recueil des discours, 1860-1869, 1re partie, 1866.djvu/74

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paravant y chercher Molière, et dont le rire épanoui, large et profond faisait songer au rire d’airain de la comédie antique, — mais une sœur plus jeune, plus légère et plus douce, qu’on pourrait appeler la Muse du sourire. — Elle parut raccompagner déjà dans le collège célèbre où il fit ses études, et où elle lui donna beaucoup de succès et beaucoup d’amis. On sait combien le souvenir de Scribe resta fidèle aux uns comme aux autres dans tout le cours de sa vie et de ses travaux : ces ferventes amitiés de collège, qui sont une des fictions préférées et une des grâces de son théâtre, cette sollicitude affectueuse dont il ne cessa d’entourer l’institution où il avait trouvé sa famille intellectuelle, font un honneur égal à la délicatesse de son cœur et à celle de sa mémoire.

Il sortit de Sainte-Barbe à dix-huit ans, déjà orphelin, presque pauvre, et incertain encore de sa vocation. Dès cette époque, à ce qu’il semble, les incertitudes de ce genre, dans l’esprit de ceux qui en étaient tourmentés pour leur compte ou pour le compte d’autrui, avaient comme aujourd’hui une solution inévitable : la toge de l’avocat. Le digne tuteur de Scribe, avocat très-estimé de ce temps, et qui avait attaché son nom à un acte généreux, à la défense du général Moreau, ne négligea rien pour assurer la marche de son pupille dans la carrière où il l’attirait. En lui faisant suivre un cours de droit romain, il lui choisissait pour répétiteur particulier, avec une sûreté de prévision qui l’honore, un jeune légiste qui devait être, qui est encore une des hautes illustrations de la tribune française et de votre compagnie. — En même temps, Scribe étudiait la procédure chez un avoué, où il aurait dû tenir la place d’un clerc. Mais son zèle