Page:Académie française - Recueil des discours, 1880-1889, 1re partie, 1885.djvu/338

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de respect et de fidélité aux institutions républicaines.

Tel est le milieu où fut élevé M. Littré et qui eut sur son caractère, naturellement docile, bon et reconnaissant, la plus grande influence.

En quittant le lycée, M. Littré, sur la recommandation du proviseur, entra comme secrétaire chez le comte Daru, qui terminait alors sa grande Histoire de la République de Venise. Le jeune secrétaire devint peu à peu l’ami et l’habitué d’une maison où l’on appréciait sa douceur obligeante, son goût pour le travail et ses connaissances, déjà si grandes, qu’outre le latin et le grec, il savait l’anglais, l’allemand et l’italien. Il se donnait même la fantaisie de composer des vers dans ces différentes langues.

« Votre fils, écrivit un jour le comte Daru au père de M. Littré, vaut mieux que ce que je lui fais faire. Donnez-lui une carrière. Quelle qu’elle soit, il y réussira. Comptez du reste sur moi en toute occasion. »

M. Littré se décida pour la médecine. A vingt-six ans, il terminait les études de l’internat des hôpitaux et il était prêt à passer l’examen de docteur quand son père mourut. Ce fut un coup désastreux pour la famille devenue pauvre. Comment subvenir aux frais qu’allaient exiger les examens et aux premières dépenses d’une installation de médecin ?

Le Dr Rayer avait remarqué depuis longtemps cet étudiant silencieux parmi les élèves les plus assidus à sa clinique de la Charité ; il devina la situation embarrassée du jeune interne et lui fit des offres de services que renouvela le libraire Hachette, ami de collège de M. Littré.

« Je n’eus pas, dit M. Littré, la hardiesse de grever