Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/13

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– Oui, monsieur, très bien.

L’étranger fronça le sourcil ; mais ce mouvement fut si rapide que Jacques n’eut pas le temps de s’en apercevoir. Un instant l’étranger tourna le crayon entre ses doigts ; puis, prenant une résolution subite, il écrivit rapidement quelques mots, déchira le feuillet, et le présentant à Jacques, attacha sur l’enfant un regard profond. Jacques examina le papier.

– Je lis, mais je ne comprends pas, dit-il.

L’étranger sourit.

– Il n’est pas nécessaire que tu comprennes, reprit-il ; mets le papier dans ta poche et saute à cheval… Bien !… Parbleu, mon garçon, tu te tiens gaillardement !… si tu t’y prends de cette façon, tu ne serviras pas de fascine à quelque fossé… Cependant, aie toujours les yeux sur les oreilles de l’animal… il est fantasque ; mais quand il est en humeur de faire un écart, il a l’honnêteté d’en prévenir son cavalier par un certain mouvement d’oreille, dont les reins de beaucoup de gens ont gardé le souvenir… Ah ! tu ris ! tu verras, mon garçon !

Comme Jacques lâchait la bride au cheval, l’étranger le retint.

– Un mot encore. Connais-tu dans les environs une maison de braves gens où je puisse attendre ton retour sans craindre les indiscrets ?

– J’en connais dix, mais il y en a une surtout qui fera votre affaire. Sortez du bois, suivez le sentier où je vous ai rencontré, prenez la grande route et arrêtez-vous devant la première maison que vous trouverez sur votre droite. Vous la reconnaîtrez facilement. Tout est ouvert, portes et fenêtres. Vous serez chez mon père, Guillaume Grinedal, comme chez vous.

– Diable ! mais j’y serai très bien, dit l’étranger avec un sourire. Va maintenant.

Il retira sa main qui serrait la gourmette, et le cheval partit. Un quart d’heure après, l’étranger entrait dans le jardin de Guillaume Grinedal. À la vue d’un étranger,