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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/137

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minute, et je l’ai reconnu. – Souviens-toi de M. de Villebrais ! s’est-il écrié, et il s’est enfui.

– M. de Villebrais ! c’était moi qu’il cherchait… moi, vous dis-je ! Ne savez-vous pas que je l’ai frappé ? dit Belle-Rose.

– Une querelle d’hier aiguise-t-elle une épée comme le fait une haine de dix ans ? J’ai vu le bras… Il assassinait par ordre.

Belle-Rose frémit de la tête aux pieds.

– Laissons cela, continua M. d’Assonville avec un triste sourire ; je suis mort ; qu’importe par qui et pourquoi je suis tué ! D’autres pensées m’assiègent et mon esprit se trouble. Écoute, avant que je meure ; après, venge-moi si tu veux.

Belle-Rose prit la main de M. d’Assonville et la serra.

– Me promets-tu d’accomplir toutes mes volontés dernières ?

– Je vous le jure.

– J’y compte. M. de Nancrais, mon frère, est possesseur d’une lettre à ton adresse. Je la lui ai remise en quittant l’armée. J’avais eu connaissance de ton duel et de ta disparition, mais je te savais innocent : ma conscience me répondait de toi. Il reviendra, me disais-je, et ce que je le charge de faire, il le fera… Tu vois que je ne me suis pas trompé.

Un accès de toux arrêta M. d’Assonville ; il porta un mouchoir à ses lèvres, et le retira humide d’une écume sanglante. Sa tête se renversa sur les coussins empilés.

– Mon Dieu ! vous vous tuez ! s’écria Belle-Rose.

– M. de Villebrais m’y aide bien un peu, répondit le capitaine avec un sourire.

– Remettez le reste de vos confidences à demain ; demain vous serez plus calme.

– Mon ami, les morts ne parlent pas. Si tu veux entendre ce que j’ai à te dire, il faut que tu m’écoutes cette nuit…