Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/172

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– C’est ma plus chère croyance.

– C’est fort bien, et je l’approuve d’avoir placé ses affections en si bon lieu. Mais comme elle est une honnête fille, ainsi que vous êtes un honnête homme, je vois d’insurmontables difficultés au dénoûment de cette tendresse mutuelle.

– Et lesquelles, s’il vous plaît ?

– D’abord ma sœur est fort roturière, étant la fille d’un simple fauconnier.

– Ceci est une affaire à laquelle ma famille aurait seule le droit de s’opposer, et comme je suis à moi tout seul toute ma famille, vous trouverez bon, j’espère, que ma noblesse s’accommode de votre roture.

– Cependant…

– Assez là-dessus. D’ailleurs, si vous y tenez, n’oubliez pas que vous êtes officier maintenant : l’épée anoblit.

– Soit ! mais Claudine n’a presque rien.

– Ce presque rien est si voisin de mon peu de chose, que sans se compromettre beaucoup, ma fortune peut s’allier à sa pauvreté.

– Vous avez une logique qui ne me permet guère de continuer. Voilà mes obstacles à bas.

– C’est sur quoi je comptais ; ainsi, vous consentez ?

– Il le faut bien, et pour elle, et pour vous, et pour moi ! Mais mon consentement ne suffit pas. Il y a de par le monde, près de Saint-Omer, un certain honnête vieillard, qui a nom Guillaume Grinedal, lequel a bien, j’imagine, quelques droits sur Mlle Claudine.

– Parbleu ! j’y serai dans vingt-quatre heures !

– Et la poste du roi en sera pour trois ou quatre chevaux fourbus.

– Tant pis pour eux ! c’est leur métier de courir.

– Est-ce le nôtre de faire de beaux projets qu’un boulet de canon peut arrêter net ?

– Bah ! la moitié de la vie se passe à bâtir des plans ; c’est autant de gagné sur l’autre.

– Ainsi, vous partirez ?