Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/19

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lui prit la main, le cœur de Jacques battit à coups rapides, et lorsque, pressant les flancs de Phœbus, l’inconnu s’éloigna au galop, longtemps le père et le fils le suivirent du regard, émus et silencieux. Au moment où ils rentraient au jardin, le pied de Jacques fit rouler un objet brillant tombé sur le sable. C’était un médaillon en or guilloché.

– Voyez, mon père, dit l’enfant ; l’étranger l’aura sans doute perdu.

– Garde-le, mon fils ; c’est peut-être la Providence qui te l’envoie.



Le souvenir de cette aventure resta dans la mémoire de Jacques. Le temps put en affaiblir les détails, mais l’ensemble demeura comme un point lumineux au fond de son cœur. Depuis le jour de sa rencontre avec l’étranger, il prit un goût plus vif aux choses de la guerre. Lorsqu’un escadron passait sur la route, bannière au vent et trompette en tête, il courait à sa suite aussi loin que ses jambes le pouvaient porter et fredonnait les fanfares pendant toute une semaine. Parfois aussi il lui arrivait d’enrégimenter les enfants du faubourg et de se livrer avec eux à un grand simulacre de bataille ou à quelque imitation de siège, qui finissait toujours par de furieuses mêlées où ses bras faisaient merveille ; tout enfant qu’il était, il se montrait déjà d’une adresse surprenante dans le maniement des armes, épée, sabre, hache, pique, dague, pistolet ou mousqueton. Les mots du marchand d’Arras : Si jamais tu t’enrôles, tu feras ton chemin, bourdonnaient toujours à ses oreilles ; mais nous devons ajouter qu’il n’y avait pas d’exercice, de revue, de combat et d’assaut que Jacques n’abandonnât volontiers pour