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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/209

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suivait Geneviève. Un cri faillit s’échapper de la bouche du jeune officier ; il voulut courir vers elle, mais une force invincible le retint à sa place ; Suzanne semblait ne pas l’avoir vu, et cependant ses paupières et ses lèvres tremblaient ; son profil n’avait rien perdu de son angélique pureté, mais elle était pâle et résignée comme la fille de Jephté. Mme d’Albergotti portait à la main une fleur ; en inclinant son front elle l’effleura de sa bouche, et la rose tomba. Elle voulut se baisser pour la ramasser dans l’herbe, où elle rayonnait comme une étoile odorante, mais elle rencontra le regard de Belle-Rose si tendre et si triste qu’elle hésita ; elle fit un pas, puis deux, et s’éloigna pressant sous ses deux mains ensemble son cœur qui battait à l’étouffer. Une seconde après, la fleur s’était fanée sous les baisers de Belle-Rose. Si rapide qu’eût été ce mouvement, il ne put échapper à Mme de Châteaufort ; elle le vit, regarda la femme qui passait la tête penchée, et son cœur lui dit que c’était là cette mystérieuse Suzanne dont le nom l’avait fait si souvent tressaillir au chevet de Belle-Rose. La présence de Suzanne au camp s’expliquait par la nomination de M. d’Albergotti au gouvernement de Charleroi. Quant à Geneviève, elle avait suivi le duc son mari, qu’une intrigue de cour avait depuis peu dépouillé de son gouvernement, et qui était accouru pour s’expliquer sur la cause de son rappel. Après la messe et les prières offertes au Dieu des armées, le roi se retira dans son quartier ; les troupes se dispersèrent, et Belle-Rose, qui n’avait qu’une pensée et qu’un vœu, se dirigea vers le logis de Suzanne. Sa main, cachée sous son habit, broyait la fleur contre sa poitrine ; elle avait une odeur pénétrante qui l’enivrait, et ses pétales embaumées étaient comme du fer chaud qui le brûlait. Le logis de Mme d’Albergotti était tout auprès de Coulé, dans un lieu qui pouvait passer pour solitaire. On n’y voyait que six compagnies de dragons. Belle-Rose tourna le long d’une haie qui défendait l’approche de la maison