Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/216

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– Qu’êtes-vous venue faire ici, madame, et que me voulez-vous ? lui dit-il d’une voix qu’il s’efforçait de rendre ferme et qui tremblait.

– Je viens, dit-elle, comme un coupable devant son juge. Oh ! reprit-elle au geste de Belle-Rose, ne me repoussez pas ; si votre cœur m’a condamnée, au moins devez-vous m’entendre.

– Et qu’avez-vous à m’apprendre que je ne sache déjà, madame ?

– Toute la vérité ; je vous parlerai comme une pénitente parle au confessionnal de Dieu. Par pitié, écoutez-moi ! Ce n’est plus au nom de votre amour que je vous invoque, ajouta-t-elle d’une voix étranglée par la crainte, c’est au nom de la justice. Les condamnés n’ont-ils pas le droit de se défendre ?

Geneviève tremblait si fort, qu’elle dut s’appuyer contre un des piquets de la tente pour ne pas tomber. Le désordre et la douleur de cette femme, jadis si fière, touchèrent Belle-Rose.

– Vous le voulez ? dit-il, parlez donc. Aussi bien, moi aussi, j’ai une mission à remplir auprès de vous, et puisque vous courez au-devant de cette épreuve, je la remplirai.

– Écoutez-moi d’abord, vous me tuerez après, si c’est votre volonté, dit Geneviève.

– Prenez garde, madame, ce n’est point ici une vaine menace. Vous avez un compte terrible à rendre, peut-être allez-vous me contraindre à venger un mort !

– Le venger ? Oh ! fit-elle, vous ne le vengeriez pas en me tuant !

L’expression du regard et de la voix était si déchirante, le sens de ces paroles était si clair, que Belle-Rose se sentit remué jusqu’au fond du cœur.

– Parlez ! lui dit-il, parlez ! Vous savez bien que, quoi qu’il arrive, ce n’est pas moi qui peux vous punir !

Mme de Châteaufort prit silencieusement la main de Belle-Rose et la porta à ses lèvres. Ce baiser muet glissa