Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/222

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Je le regardai, effrayée déjà du son de sa voix.

– Cet ami, c’est moi qui l’ai tué ! reprit-il.

Je poussai un cri terrible à cet aveu, et j’écartai de mes mains les mains de M. d’Assonville : il me semblait y voir du sang.

– Ne me maudissez pas, Geneviève, me dit-il ; je vous aimais, j’étais jaloux. Quand j’arrivai d’Italie, à la première auberge où je m’arrêtai à Écouen, votre nom fut prononcé avec celui de don Pèdre. On disait que vous vous aimiez… Je devins fou, et la première personne que je rencontrai dans le parc, ce fut lui. Nous étions jeunes et tous deux armés… Vous savez le reste. Je partis sans vous voir… Hélas ! je vous accusais, et vous étiez mère !

Il parla longtemps, mais je ne l’entendais plus. Un bruit confus emplissait mes oreilles, mon cœur se tordait et je m’évanouis. Gaston me laissa aux mains de ma nourrice. Quand je revins à moi, un enfant pleurait à mes côtés.

– Un enfant ! répéta Belle-Rose ; c’est à lui que se rattache ma mission.

– Eh ! dit Geneviève, votre mission sera facile. Ce que vous voudrez, je le voudrai. Une fièvre ardente me cloua sur ce lit de souffrance, continua-t-elle, sur ce lit où je n’eus pour mon enfant que des baisers trempés de larmes. Je ne sais combien de temps dura ce délire ; ma nourrice écartait tout le monde de ma chambre ; ma tante, confite en dévotion, me voyait à peine une minute au retour de ses stations à la chapelle du château. J’étais en convalescence quand mon père revint. – Je vous amène un mari, le seigneur dont je vous ai parlé, me dit-il, avant de m’avoir embrassée, et il me le présenta sur l’heure.

– C’était M. le duc de Châteaufort ? dit Belle-Rose.

– Lui-même. M. d’Assonville avait disparu depuis la scène du pavillon. Il avait cru à ma trahison, à mon tour je crus à son oubli. Que vous dirai-je ? Mon père