Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/286

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

– Vous ne savez pas ce que c’est que M. de Louvois ! dit Mme de Châteaufort, que le désespoir rongeait.

– Je sais ce que peut un cœur honnête et déterminé. Il le hait, moi je l’aime ; nous verrons.

Geneviève étouffa un soupir.

– Essayez, madame ; tout ce que je pourrai faire pour vous aider, je le ferai.

Suzanne lui ayant demandé où en étaient les choses depuis le jour de l’emprisonnement, Geneviève lui raconta tout ce qu’elle savait et tout ce qu’elle avait tenté. Au récit des tortures infligées à Belle-Rose, Suzanne frissonna.

– Louis XIV est roi de France, et voilà ce qu’il permet ! s’écria-t-elle avec l’horreur d’une amante épouvantée.

Elles étaient encore ensemble quand un laquais vint avertir la duchesse qu’un homme était à la porte, insistant pour être introduit auprès d’elle.

– Quel est cet homme ? fit-elle.

– Il m’a dit s’appeler la Déroute, répondit le laquais.

– Qu’il entre tout de suite ! dit Suzanne.

– Que sais-tu et que veux-tu ? reprit Mme de Châteaufort quand la Déroute eut été introduit.

– Je sais que mon lieutenant est en prison, et je veux qu’il soit libre ! répondit l’honnête sergent.

– Eh bien ! dit Suzanne, il faut le faire évader.

– De la Bastille ? Eh ! madame, on réussirait aussi bien à tirer un damné des griffes du diable ! Il y a des sentinelles à toutes les portes, et des portes à tous les couloirs, des guichetiers partout. Les murs ont vingt toises de haut, les fossés vingt pieds de profondeur, et je ne sais pas un trou où il n’y ait des barreaux gros comme le bras.

– Cependant, dit Suzanne, il n’est pas de cachot, pas de forteresse, pas de citadelle d’où l’on ne puisse sortir. Rien n’est impossible à la volonté.

– Rien, quand elle est aidée par le temps. Vous ne