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Page:Achard - Belle-Rose, 1847.djvu/520

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– Il est clair, dit M. de Charny, qu’elle doit l’être à l’un de nous.

Tant d’audace étonna Belle-Rose, qui se sentit une furieuse envie de casser la tête au favori de M. de Louvois.

– Le relais ! s’écria tout à coup Cornélius.

M. de Charny se pencha hors de la portière ; on voyait à quelques centaines de pas briller une lumière dans la nuit. Le mouvement de M. de Charny n’échappa point à Belle-Rose.

– Monsieur, lui dit-il d’un ton de voix ferme et bref, je vous jure que je vous tue comme un chien, non pas même au premier cri, mais au premier geste.

– Et si par hasard Belle-Rose vous manquait, moi, je ne vous manquerais pas, ajouta Cornélius.

M. de Charny ne se méprit pas à l’accent des deux cavaliers ; il s’accula dans un coin comme un sanglier et ne bougea plus. On arriva au relais, qui avait été préparé d’avance à Franconville. Les chevaux écumants furent dételés ; la Déroute et Grippard sautèrent rapidement de selle, et remplacèrent aux portières du carrosse Belle-Rose et Cornélius, qui échangèrent aussi leurs chevaux. Il n’y avait sur la route que des valets d’écurie presque endormis ; la pluie tombait par rafales. M. de Charny se résigna. On courut jusqu’à Saint-Denis, on relaya de nouveau, et le carrosse continua sa route vers Paris. Au bout de cinq cents pas, Belle-Rose salua M. de Charny de la main.

– Votre compagnie nous a servi d’escorte, lui dit-il ; elle nous a valu la liberté, je vous laisse la vie et nous sommes quittes. Tâchons maintenant de ne plus nous rencontrer.

Pendant ce petit discours, la Déroute et Grippard avaient coupé les traits et forcé, le pistolet au poing, les postillons à descendre de cheval. Au moment où Belle-Rose lâchait les rênes, tous partirent à fond de train. Au bout d’une minute, le bruit de leur course précipitée