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Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/174

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— Ah ! vous êtes un terrible homme ! dit-elle.

— Non, madame, je suis un homme logique et tiens surtout à mériter la bonne opinion que monseigneur Jean de Werth a de mon humble personne.

— Faites à votre guise… vous avez carte blanche, dit Thécla.

— Alors je réponds de tout.

Ce jour-là même on permit aux deux cousines d’écrire à M. de Pardaillan.

Il arrivait quelquefois à Mme d’Igomer de s’absenter pendant plusieurs jours. Elle se rendait alors au camp impérial en grand mystère ; nul ne le savait, que Mathéus, qui restait maître absolu du château et y exerçait une autorité souveraine. Il avait des espions qui battaient le pays tout alentour, éclairaient les routes à dix lieues à la ronde, et lui rendaient compte de tout ce qui se passait. Ils avaient ordre de répandre habilement dans les auberges les noms des deux prisonnières, pour que ce ne fût bientôt plus un secret pour personne. Quelque chose en arriverait peut-être aux oreilles de M. de la Guerche et de Renaud, et les attirerait à l’ombre des tourelles de Drachenfeld. C’était là que Mathéus les attendait.

Le départ de la baronne suspendait les fêtes : plus de danses, presque plus de musique, mais des sermons en abondance, des oraisons et des conférences pieuses, durant lesquelles le franciscain s’efforçait de convertir ses ouailles. Après de longues journées passées en controverses, s’il n’obtenait rien, le digne moine plaçait dévotement ses bras en croix sur son abdomen rebondi.

— Le diable tient bon, disait-il, mais je ferai tant, que je finirai bien par l’exorciser.

Et toujours roulant sur ses courtes jambes, toujours souriant, toujours bénissant, il continuait ses prédications.