Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/175

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De nouvelles de M. de la Guerche et de M. de Chaufontaine, on n’en avait point.

En l’absence de Mme d’Igomer, la police intérieure, en quelque sorte intime et domestique du château, appartenait à une dame cérémonieuse et formaliste qui avait la taille d’un mousquetaire, des cheveux jaunes, des yeux pâles, la tête carrée, les jambes d’une autruche, et dont l’existence se passait à embarrasser la vie d’autrui de mille petites difficultés. Avec elle, chaque heure avait son emploi, et nulle puissance humaine ou nul événement ne l’aurait déterminée à en changer la destination. Mme de Liffenbach n’avait qu’un dogme, la règle, et qu’une foi, l’étiquette. Elle ne parlait jamais qu’à voix basse et avec la douceur du vent qui soupire ; mais sous cette douceur apparente il y avait l’entêtement du mulet. Rien ne lui échappait. Ses longues jambes la promenaient partout, et ses yeux, d’un bleu indécis et comme effacé, avaient des regards de lynx.

Mlle de Souvigny et Mlle de Pardaillan étaient placées sous sa surveillance spéciale. Mme de Liffenbach ne leur permettait pas une minute de repos. Ce n’était que la nuit qu’elles avaient la permission de causer librement, et encore n’était-ce point aisé, leurs chambres étant séparées par une galerie. Aussi longtemps que durait le jour, la bonne dame, vêtue d’une robe à l’ancienne mode, les instruisait des différents degrés de respect qu’il faut accorder aux personnes de Cour, suivant le rang qu’elles occupent dans la noblesse ; elle variait ces petits discours par les traités sur l’étiquette qui était en usage dans la capitale de l’électeur de Bavière, et des oraisons sur les perfections de la grâce et les mérites de la pénitence. Par des détours habiles, elle prenait texte de ces conférences pour insinuer aux deux cousines que M. le comte de Pappenheim et M. le baron Jean de Werth feraient leur bonheur