Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/226

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cri faillit partir de ses lèvres ; Magnus, qui s’était mis à genoux près de lui, saisit son bras et le serrant :

— Pas un mot, pas un geste, ou vous les perdrez avec nous ! murmura-t-il.

M. de la Guerche se contint, mais on le voyait trembler comme un arbre secoué par le vent.

— Tendez la main…, reprit Magnus, n’êtes-vous pas un pèlerin et ne devez-vous pas demander l’aumône ?

Le cortège passa près d’eux ; le pan de la robe d’Adrienne frôla le vêtement du pèlerin. Incapable de se maîtriser, Armand-Louis porta le bout flottant de cette robe à ses lèvres.

Mlle de Souvigny ralentit sa marche, et, laissant tomber une aumône aux mains de cet inconnu :

— Priez pour moi, dit-elle.

Sa voix était si triste, que les yeux de M. de la Guerche se remplirent de larmes.

— Baissez la tête, voici le seigneur Mathéus, reprit son inflexible gardien.

Les genoux d’Armand-Louis restèrent cloués au sol ; mais, quand il se releva, le feu de la colère et de l’exaltation enflammait son visage.

— J’y laisserai mes entrailles ou je la sauverai ! dit-il.

Un matin, c’était le quatrième depuis l’arrivée des dragons, la trompette retentit de nouveau dans les bois. C’était un escadron de Croates qui venait de traverser toute l’Autriche pour se rendre sur le théâtre de la guerre. Un peu harassé de son long voyage, il faisait halte. Quelques gentilshommes huguenots lui rendirent visite.

M. de Collonges rentra dans la soirée, enchanté de sa promenade.

— Réjouissez-vous, messieurs, dit-il, nous allons peloter en attendant partie. Les choses ont tourné si bien dans notre