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Page:Achard - Envers et contre tous, Lévy frères, 1874.djvu/60

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VI

BADINAGES AUTOUR D’UN PÂTÉ Tandis que ces choses se passaient dans un coin de Magdebourg, un moine, qui appartenait à l’ordre des capucins, rôdait autour de la maison où les fourriers de l’armée avaient marqué le logement de Jean de Werth. C’était un homme long comme un échalas, maigre comme la patte d’un lièvre, sec comme un bout de ficelle, pâle comme un linceul. Ses yeux mobiles ne perdaient rien de ce qui se faisait autour de lui ; toujours en mouvement, sombres, avec des éclairs rapides, ils avaient quelque chose d’inquiet, de farouche et de félin, qui rappelait les yeux des bêtes fauves. Quelquefois le moine oubliait de répondre au salut obséquieux des soldats chargés de butin qui lui demandaient sa bénédiction ; d’autres fois, il leur envoyait un signe de croix jeté négligemment de la main droite, et un sourire où l’on sentait la convoitise beaucoup plus que l’humilité. Jamais il ne s’éloignait de la maison, devant laquelle allait et venait une sentinelle bavaroise.

La nuit venait, les bruits se taisaient ; quelques maisons, qui flambaient encore, projetaient une lueur rouge sur le ciel assombri. On entendit alors, dans la rue voisine, le pas de quelques hommes dont les lourdes bottes frappaient le sol à coups pressés. Bientôt l’ombre du capucin se dessina sur le mur