le monde infini la joie lumineuse des aubes, la splendeur pâmée des midis et les poignantes incertitudes des crépuscules.
Des pins parasols découpent, noires sur les métaux en fusion du couchant, leurs silhouettes étranges qui donnent une telle intensité, une allure si puissante à ce paysage de lumière. Nous ne les avions pas encore vus jusqu’ici en aussi grand nombre et, plus que les palmiers et les cactus hérissés, leur gravité mélancolique annonce un changement radical du climat, le calme et la douceur et les enchantements étendus sous leurs rameaux, la vie facile sur la terre prodigue sans que la charrue ait besoin de la creuser profonde pour en tirer les fruits. Je me rappelle le rocher de Gibraltar, sphinx accroupi, énorme et bleuissant, découvert tout à coup dans le lointain de la mer avec ces mêmes encadrements de pins parasols, et je cherche à distinguer ici, dans l’obscurité croissante qui envahit les campagnes, l’ombre gigantesque du Vésuve sur lequel se balancent les fumées éternelles.
La nuit est venue, complète maintenant. J’éprouve comme une sensation de cauchemar en promenant mes yeux autour de moi dans le compartiment où nous sommes quelques-uns, bien à l’aise pourtant ; on dirait que tout vient d’être diminué, rapetissé et que je ne suis plus moi-même qu’une petite chose, comme dans ces délires de fièvre où les prunelles dilatées, après avoir exagéré jusqu’à la terreur les formes démesurées, ensuite écrasent, diminuent, resserrent l’être entier qui s’anéantit. Je venais de tomber