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PARTENZA…

poursuit avec cette obsédante impression de bazar, d’instabilité, d’endroit où l’on passe seulement ; et j’ai toutes les peines du monde à m’isoler quelques instants en la ferveur mal assurée de vagues prières…


Par la belle route qui se déploie sur la mer et sur Nice, blanche et sinueuse parmi les villas, nous allons à Villefranche. Nice peu à peu s’enfonce et disparaît ; seule encore, tel un gros scarabée brun, la Jetée-Promenade flotte sur l’eau, puis s’efface. Au détour de la corniche paraît, merveilleuse, la rade de Villefranche étendue à nos pieds dans un large rayon de soleil ; ses flots limpides sont bordés d’une fine dentelle, d’un ourlet de guipure qui court le long des côtes sombres d’alentour ; et la ville, là-bas, égrène ses maisonnettes du bord extrême du rivage jusqu’aux flancs des rochers ; leurs couvertures de tuiles roses et rouges jouent dans la lumière ; les ruelles irrégulières dégringolent vers la rive, franchissant des jardins d’œillets et de violettes. Comme nous désirons emporter de ces fleurs qui demain seront la joie du marché de Nice, une belle fille s’approche et va nous renseigner ; douce et timide sous la dorure de ses cheveux, sa main enveloppe d’un seul coup tout un coin de vergers à peine enclos de haies fleuries, pour nous montrer les gerbes encore sur pied que demain matin elle portera à la ville.

— Mais ce soir, dit-elle, on ne peut en avoir, personne ne travaille, c’est fête, n’est-ce pas !

Et les cloches des vêpres, juste à ce moment, accouplent aux senteurs qui s’échappent de toutes