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PARTENZA…

autour d’un cimetière, véritable celui-là, sur quatre côtés, courent les arcades innombrables de beaux et uniformes portiques. Tandis qu’au milieu sont les tristes croix de bois des miséreux qui n’ont droit qu’à la terre, qui n’ont droit à aucun autre mausolée que les fleurs en touffes, les verdures dans la belle saison, et, dans l’hiver, la neige scintillante avec les sveltes balancements des cyprès, — sous les arcades sont les monuments des riches, les marbres coûteux érigés en apothéoses, en allégoriques enlacements ; fantômes blancs et immobiles sous qui l’on devine de noires et mobiles décompositions !… Et combien tristes ces membres figés dans des gestes sans idéal par le jeu facile d’une virtuosité sans grandeur ! Chaque famille s’est appliquée pieusement à rappeler les traits des chers absents, leurs attitudes coutumières, mais avec quelle recherche puérile de détails et quelle absence de mouvements vrais, quand il faudrait si peu de chose pour réveiller dans le cœur l’affaissement des pensées endormies et faire couler des larmes ! Non, on a voulu surtout des corps et des vêtements : un chapeau est soigneusement creusé jusqu’à la coiffe où l’on cherche la marque de fabrique ; des chaussures portent le long des cuirs assemblés la piqûre des aiguilles qui les ont cousues ; ce sont des pantalons qui tombent, impeccables, sur des talons fort bien tournés et laissent deviner le drap dont ils sont fabriqués ; des coiffures de femme ornées de fleurs et de plumes qui remuent peut-être au souffle du vent ; des mantilles où chaque maille du tissu ouvragé se distingue